Un polar sociétal ?
C'est quoi, un polar « sociétal » ?
J'aurais plutôt tendance à le décrire comme une sorte de « docu-polar ». Ce qui m'intéressait, c'était de sortir du pur divertissement, de reprendre les ingrédients du genre en y ajoutant une touche de réalité, forcément sombre — « noire », pourrait-on dire — comme l'exige le polar, mais tout autant la brutalité courante, socio-économique, du quotidien. Chaque enquête du commissaire Delajoie aborde ainsi une problématique de l'ordinaire. Dans L’Éclat du diamant, en l'occurrence, il s’agit de notre rapport à l'image et de ces relations troubles qu’entretiennent la publicité et le marketing avec nos modes de consommation.
Avec le premier tome de cette nouvelle série, vous avez fait le choix d’un polar 100 % français ? Est-ce encore désirable, vu les succès de librairie ?
Qui en douterait ? Prenez Vargas, par exemple, et son commissaire Adamsberg ! C’est vrai que je voulais renouer avec la tradition du « polar à la française », tombée un peu en désuétude ces dernières années. Le monde de l’édition traditionnelle a sa part de responsabilité dans cet abandon. Les grands éditeurs ne prennent plus de risques et se contentent de proposer des traductions, de gérer « les droits étrangers », comme on dit techniquement.
Vous faites aussi le pari du groupe, au détriment du « héros » classique, souvent isolé et torturé, parfois en marge du système lui-même. Pourquoi ?
Je souhaitais plonger le lecteur dans le quotidien d’une équipe, celle du mythique « 36, quai des Orfèvres ». Le « patron », le commissaire Delajoie, n'est effectivement pas un enquêteur solitaire, doté d’une intuition ou d'un flair hors normes. Il réussit toujours grâce à son équipe qui n’est donc pas un simple faire-valoir. J’aime bien cette idée du « collectif », dans la fiction comme dans la vie, la seule possibilité justement de nous aider à lever la tête…